
Ce n’est pas moi.

Votre serviteur.
L’affaire Olivier Duhamel
Vous avez sans doute appris récemment qu’un de mes homonymes, le politologue et intellectuel français Olivier Duhamel a récemment été accusé d’inceste.
Ça n’est pas moi, mais vous le saviez déjà. Il n’y a aucune chance d’une erreur d’identité. Je suis beaucoup plus séduisant.
Je voudrais cependant m’exprimer ici pour dire que ce type n’a encore aujourd’hui été accusé d’aucun crime. Une enquête a été ouverte dont il est le seul suspect, non pas l’accusé. Si l’instruction démontre qu’il a effectivement commis un crime, il sera alors arrêté par mandat, accusé ou mis en examen par un juge, jugé à l’issue d’un procès et peut-être condamné selon le code pénal et l’avis d’un magistrat représentant de l’état. Un journaliste respectable aurait alors du titrer « … suspecté d’inceste » et non pas «…accusé d’inceste », ce qui est faux. Avec aussi peu de rigueur et d’exactitude, les media ne s’etonneront pas qu’on leurs donne du “Fake News”
Ce qui se passe en ce moment dans la presse et les médias sociaux révèle plutôt du lynchage. Le type a déjà été accusé, jugé et exécuté par une foule hystérique. Même si sous les lois de la république, il est toujours en liberté, sa vie, sa carrière, sa réputation ont déjà été complètement anéantis par les villageois en colère qui l’ont tout de suite pendu haut et cours sans autre forme de procès. Des tas de gens instruits et intelligents n’ont pas une seule seconde hésité à jeter la première pierre et sont sans doute fiers de leur sens moral et certains de leur bon droit, comme de bons bourgeois.
C’est pourtant simple. La morale peut se résumer en trois mots : « conduisons-nous bien. » Pas besoin des dix commandements pour comprendre ça.
Même si je trouve cette justice populaire dangereuse, malsaine et tout à fait excessive, un peu comme ces groupes d’autodéfense qui agissent en dehors de toute procédure judiciaire légale, c’est malheureusement devenu très courant. Il arrive trop souvent que des innocents soient massacrés par la vindicte publique, par des patrouilles de citoyens se lançant dans des croisades justicières, armés de leur compte Facebook ou Twitter et agissant, derrière la sécurité de leur écran, en justicier amateur sur la base d’informations ou rumeurs très floues. Imaginons que l’on découvre que ce type n’a absolument pas commis d’inceste, que l’histoire a été fabriquée, que ces révélations ne soient que des mensonges. Cette hypothèse ne peut pas être raisonnablement écartée avant qu’une enquête l’établisse, qu’un jugement soit rendu et que sa culpabilité soit établie au-delà de tout doute possible. Comment pourrions-nous alors nous justifier d’avoir aujourd’hui trainé dans la boue un innocent ?
Pour le cas Duhamel, Je pense aussi que l’auteure qui a publié ces révélations dans un livre aurait dû en premier lieu avertir la police de ses soupçons, c’est ce qu’on attend de l’honnête citoyen. Une juriste comme elle devrait savoir ça et comme elle n’a pas l’air d’une idiote, on pourrait s’imaginer qu’elle s’en est abstenu parce que si une enquête avait été ouverte sur la base de son temoignage, le juge d’instruction aurait pu lui interdire d’en parler en public, l’empêchant du même coup de faire pour son livre de la pub gratos et donc, des gros sous. Cette attitude pourrait d’ailleurs faire mettre en doute la sincérité de son témoignage et d’ouvrir donc la possibilité que le crime ne soit jamais puni.
Je ne suis pas légiste mais il me semble quand même que cette sonneuse d’alarme devrait être accusé de complicité. Elle était en effet au courant des faits bien avant la publication de son livre. Pourquoi s’est-elle donc tue au lieu d’alerter les autorités? Elle m’apparait tout aussi coupable et complice que tous les autres qui savaient eux aussi mais se sont tus.
Je ne défends absolument pas mon homonyme, je souhaite simplement qu’il soit traité comme je souhaiterai qu’on me traite et qu’on accorde aux suspects le bénéfice du doute, un principe juste et droit.
On a vu récemment des milliers de gens défiler dans les rues pour manifester leur opposition à un projet de loi visant à règlementer l’usage des médias sociaux et à limiter la publication d’images et de vidéos de violences et autres crimes dont la diffusion incitent trop souvent à des lynchages publics et privent donc accusés et victimes d’un procès équitables. Comment en effet assembler un jury impartial lorsque l’opinion publique a déjà décidé et que des tas d’informations non vérifiées circulent librement, amplifiées au portevoix mégaphonique de l’Internet.
C’est pourtant un très bon projet de loi. Si un citoyen est témoin d’un incident, de violence ou de crime, sont devoir et d’en aviser la police, de témoigner en justice et sous serment et non pas d’aller chercher son fusil numérique et de tirer dans le tas à tort et à travers.
Notons au passage que ces protestataires bien-pensants, instruits gratuitement par la république indivisible, laïque, démocratique et sociale, se sont rassemblés par milliers, pendant plusieurs heures, sans masques et au coude à coude, ignorant complétement les consignes sanitaires. On a donc vu apparaitre deux semaines plus tard des quantités de nouveaux foyers de contaminations si importants que les autorités sanitaires ont dû instaurer un nouveau confinement. Quelle belle réussite !
Je comprends que beaucoup de gens puissent avoir perdu confiance dans les institutions républicaines, Il y a eu trop d’exemples de corruption et d’abus. Mais réjouissons-nous quand même que ce soient ces mêmes institutions qui nous permettent de manifester notre mécontentement ou nos revendications, de parler à nos représentants parlementaires, d’aller aux urnes pour virer ceux qui nous déplaisent, d’appeler la police à l’aide et de bénéficier d’une justice aussi juste que possible.
Même les sculpteurs s’octroient le droit de faire du commentaire social. Si vous souhaitez intervenir: Olivieroduhamel@gmail.com